Enfant, j'avais peur du noir. Je pense. On me dit que la peur du noir n'est pas la peur de l'obscurité en elle-même mais plutôt des dangers qu'elle pourrait masquer. Mais moi, j’avais peur du néant du noir.
Je ne me souviens pas de la première fois où je me suis rendu compte que je mourrais un jour, peut-être nous sommes tous nés en le sachant. Cependant, je me souviens de la première fois où j'ai vraiment pensé au néant qui suivra ma mort. J'avais cinq ans, allongée dans mon lit, essayant d'imaginer ce que le néant pouvait ressentir. J’ai fermé les yeux, mais en pensant à rien, je pensais à quelque chose, et en essayant de ne rien sentir, je sentais tout. J’ai pleuré.
Depuis lors, je n'ai pas pu dormir dans le noir. Parfois, je pense un peu trop à la fréquence à laquelle je cligne des yeux, à la façon dont ma poitrine se lève et tombe lorsque je respire, à la façon dont je peux toujours sentir ma langue dans ma bouche ou à la gravité qui me tire vers le bas. Parfois, je pense un peu trop aux choses auxquelles on n’est pas censé penser, comme après ma mort, je ne ressentirai plus rien de tout cela: les pulsations de mes veines, le goût de ma propre bouche, l'air dans mes poumons.
Je ne peux pas comprendre le néant. J'ai peur d'avoir hâte de le savoir.
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